La mangue est un produit très répandu au Burkina Faso. 300 000 tonnes de mangues sont produites chaque année, et une partie importante est absorbée par les industries agroalimentaires. Le président de l’Association professionnelle des exportateurs et commerçants de mangues du Burkina Faso (APROMAB), Issiaka Bougoum, soutient que la filière génère plus de 14 milliards de francs CFA par an. La production de mangues séchées est de 2 774 257 tonnes en 2018, selon les données de l’APROMAB. Cependant, les déchets issus de la transformation sont abandonnés dans la nature et contribuent à une forte pollution des décharges.
Un nouveau procédé a été mis au point afin de transformer ces déchets en énergie. Dieudonné Ouédraogo, doctorant en sciences exactes et appliquées à l’université Joseph Ki-Zerbo, spécialiste en énergies renouvelables, est à l’origine de cette technologie qui transforme les déchets en biogaz.
Pour 1kg de déchets de mangues, la quantité quotidienne de biogaz produite est de 0,061 m3, explique l’inventeur. Sa technologie se veut être une alternative au gaz butane qui s’avère coûteuse pour les unités de séchage de mangues : « Le gaz butane est beaucoup utilisé dans les unités de transformation de mangues séchées […] alors qu’elles produisent beaucoup de déchets humides que sont les mangues mûres, pourries, les peaux qui peuvent leur permettre de produire de l’énergie en quantité et sans coût », explique le chercheur.
Grâce à la technique de la méthanisation, explique le chercheur, les déchets de mangues sont placés dans un milieu anaérobie (sans oxygène), notamment dans des digesteurs. Cela favorise la naissance des micro-organismes qui vont transformer ces déchets en biogaz au bout de 3 à 5 jours dans les digesteurs jusqu’au 20e jour.
« Les unités de transformation des mangues n’auront plus à acheter le gaz butane puisqu’elles ont les déchets de mangues gratuitement à leur portée et qui leur permettront de fabriquer du biogaz en quantité voulue pour le fonctionnement de leur unité industrielle. Si le digesteur est bien entretenu, elle peut produire du biogaz pendant vingt ans », révèle Dieudonné Ouédraogo.
La gestion des déchets : un vrai casse-tête
L’introduction du séchoir tunnel, une technologie venue d’Afrique du Sud, a apporté une véritable révolution au sein des entreprises de séchage de mangues. L’Attesta, un autre type de séchoir, produit 20kg/24h de mangues séchées tandis que le tunnel en produit 250 kg/24h.
Comme sa performance est supérieure, les déchets engendrés le sont proportionnellement (84 tonnes par campagne pour l’entreprise Tansyla à Toussiana, dans l’Ouest du Burkina, à 420 km de Ouagadougou). Cette source d’énergie est un poids financier conséquent pour les ressources des entreprises. La majorité de ces séchoirs fonctionnent au gaz butane.
« La gestion des déchets et leur évacuation demandent beaucoup de moyens. Les mouches dérangeaient le voisinage. Au départ, les déchets de mangues étaient enfouis dans des fosses creusées au sein de l’usine. Avec la chaleur, ils sèchent dans la fosse et on les vide pour les jeter ou les brûler à 7 km de l’usine », précise le chef de la production de Roseeclat, Roland Nikiéma. Dans son entreprise, outre l’électricité, les séchoirs fonctionnent avec 29 bouteilles de gaz par jour pendant les trois mois que dure la campagne. « L’électricité, nous coûte très cher. Sans gaz butane, l’usine ne peut pas fonctionner. L’utilisation du biogaz pourrait être une aubaine pour la gestion de nos déchets et nous permettre d’avoir de l’énergie sans coût et de réduire notre facture énergétique », détaille le chef de production Roland Nikiéma.
Le recyclage des déchets : l’avenir de la production
Issaka Ouédraogo, chef du département énergie à l’Institut de recherche en sciences appliquées et technologies (IRSAT), est convaincu que cette technologie va permettre aux unités implantées sur le territoire national de se procurer une source d’énergie à moindre coût. Le traitement des déchets contribue à assainir le cadre de vie et à offrir de multiples avantages tels que l’accès à une énergie propre pour la cuisson et l’éclairage, l’accès à de l’engrais organique pour renforcer la sécurité alimentaire, indique Gwladys Sandwidi du Programme national de biodigesteur au Burkina Faso (PNB-BF).
La gestion des déchets permettra au Burkina Faso de relever la part contributive des énergies renouvelables dans le bilan énergétique du pays.
Source : 24haubenin.info