Si les problèmes de sécheresse dans le Sud inquiètent beaucoup les producteurs, les cultures maraîchères dans certaines zones du Nord du pays sont à l’inverse menacées à cause d’un excès de pluie, d’un manque d’ensoleillement et de températures encore trop froides pour la saison : « Cela fait 18 ans que je fais de l’asperge et cette année est particulièrement atypique. Lorsque je me suis lancée dans cette culture, on récoltait les premières asperges début mai. Période pas forcément idéale en termes de consommation, puisque les Français ont tendance à se détourner dès juin de l’asperge au profit de fruits et légumes plus estivaux. Grâce à certaines techniques de production comme la culture sous petit et grand tunnel, nous avons réussi au fil des années à avancer la récolte au 15 mars, pour gagner en précocité et commencer plus ou moins en même temps que les bassins du Sud. Les dernières saisons s’étant réchauffées avec le changement climatique, nous avons même augmenté nos rendements. Mais cette année, il n’a pas arrêté de pleuvoir, nous n’avons pas non plus eu de soleil, ce matin encore, le sol était gelé, l’asperge n’a donc pas poussé. Nous commençons seulement à récolter les premières cette semaine et espérons que les 15 prochaines jours, avec la fête des mères et les réunions familiales, la consommation sera au rendez-vous. Mais pour l’instant, notre rendement est quasi-nul », rapporte Olivier Thomas, Co-gérant avec sa sœur Françoise de la Ferme du Pont d’Achelles, située près de Lille.
Une gamme très variée de légumes
Fort heureusement, l’asperge ne représente qu’une partie de la production de la ferme qui s’étend sur 70 hectares : « Nous sommes une exploitation familiale depuis 8 générations. Aujourd’hui, je travaille avec ma sœur Françoise, mon épouse et ma fille et nous proposons une gamme de légumes très complète. Nous avons 15 hectares de maraîchage et un petit département fleurs. Nous exploitons à peu près 1 hectare de serre chauffées et 3 hectares de tunnel. Mais malgré ces technologies, la production des légumes printaniers a tout de même été impactée comme l’a été l’asperge par le manque d’ensoleillement. L’excès de pluie continue aussi de nous pénaliser dans notre travail, puisque les champs sont impraticables, ce qui nous empêche de planter ».
Un modèle de vente basé sur la vente directe
Mais la grande spécificité de la ferme familiale, c’est de vendre 90 % de sa production au détail pour une vente directe du producteur au consommateur. Un choix historique déjà fait à l’époque des parents d’Olivier et Françoise : « Nous vendons directement à la ferme la plus grosse partie de notre production. Mon épouse fait également 5 marchés par semaine et proposons également un service de vente en ligne. Nous faisions aussi partie des tout premiers à avoir un distributeur automatique ». Aux côtés des produits frais, La Ferme du Pont d’Achelles propose également des conserves : « Là encore, c’est une activité historique puisque ce sont mes grands-parents qui, avec l’arrivée de la conserverie grâce aux Américains dans les années 50, ont commencé à produire des légumes pour les conserveries. Cela fait 20 ans maintenant que nous avons investi dans un atelier pour transformer nos légumes directement sur place. Mais il s’agit d’une activité secondaire, puisque notre cœur de métier reste le maraîchage. »
Maraîcher : un métier en voie de disparition ?
Bien que l’absence d’intermédiaires soit de prime abord un atout en termes de valorisation du produit à la vente pour l’exploitant, Olivier et Françoise font face aux mêmes problématiques que les autres producteurs : « On sent que la consommation diminue dans ce contexte de crise économique. En parallèle, nos coûts de production : intrants, énergie, main d’œuvre, ne cessent d’augmenter. Mais nous sommes limités dans la répercussion sur le prix consommateur face au risque de voir nos ventes diminuer. Or, nous ne pouvons tout simplement pas produire bon marché et il semble que ce soit dans l’ADN des gens de pousser un cadi. Bien que ce soit de loin le mode de fonctionnement qui nous convient le mieux, ce n’est pas pour autant toujours évident. Quant à la main-d’œuvre, nous sommes tellement diversifiés que c’est particulièrement compliqué d’en trouver qui puisse être polyvalente. Aujourd’hui, je suis très inquiet car je tiens beaucoup à notre métier de maraîcher, mais il semble malheureusement en voie de disparition. C’est un métier qui est de plus en plus compliqué ».
Pour plus d’informations :
Olivier Thomas et Françoise Thomas
La Ferme du Pont d’Achelles
Tél. : 03 20 48 60 43
[email protected]
https://www.lafermedupontdachelles.fr