Une pénurie de raisins de table touche de nombreux marchés clés, entraînant des prix exceptionnellement élevés à l'approche de la période stratégique des ventes de Noël et du Nouvel An. La fin prématurée des campagnes en Californie, en Espagne et en Italie, combinée au démarrage tardif de la saison en Afrique du Sud, complique considérablement la transition entre les zones d'approvisionnement. Les supermarchés britanniques ont dû payer des tarifs plus élevés pour acheminer par avion des raisins depuis la Namibie et l'Afrique du Sud. De leur côté, le Pérou et le Brésil ont également fait face à une demande accrue, mais les retards logistiques ont limité leur capacité à répondre promptement à cette demande massive. En Amérique du Nord, où les prix restent élevés, les détaillants ont commencé à délaisser les raisins californiens au profit des fruits péruviens et brésiliens.
Aux Pays-Bas, le marché du raisin devrait rester dynamique tout au long du mois de décembre, avec des prix soutenus par une offre insuffisante observée également en Allemagne. En Italie, la transition vers les raisins sans pépins connaît une progression fulgurante. En Espagne, l'offre limitée maintient des prix particulièrement élevés. En France, les derniers raisins en provenance d'Espagne et d'Italie sont encore disponibles sur le marché, portés par une demande accrue et des niveaux de prix élevés.
Afrique du Sud : début tardif et récolte de taille honorable attendue
Les exportations de raisins sud-africains sont estimées à 76,4 millions de cartons pour cette saison, bien qu'à la semaine 48, seulement 4 millions aient été inspectés pour l'exportation, soit une baisse de 30 % par rapport à l'année précédente. Ce retard s'explique par un début de saison plus tardif.
Malgré un démarrage lent, frustrant au vu des excellentes conditions du marché, les régions de production situées le long du fleuve Orange bénéficient d'une météo favorable. Cela garantit une récolte de bonne qualité, sans dommages liés à la pluie. Au début de la saison, une quantité significative de raisins a été acheminée par avion vers les détaillants de l'hémisphère Nord, soucieux de garnir leurs rayons rapidement.
Un exportateur explique : « Le retard est lié à un printemps plus frais, ce qui ralentit le développement du degré Brix des raisins blancs précoces. L'offre reste limitée, entraînant des prix élevés. Les supermarchés n'hésitent pas à payer un supplément pour le fret aérien afin de maintenir un minimum de stock en rayon. » Un autre exportateur ajoute : « Malgré ce retard, nous maintenons une priorité sur la qualité. Les fruits sont sains, annonçant des baies bien calibrées et un marché prometteur. »
Le Nouvel An chinois, célébré plus tôt cette année, influencera les expéditions, les raisins destinés à cet événement devant être emballés dès la première semaine de janvier. Toutefois, un exportateur souligne que le marché chinois reste saturé de raisins Shine Muscat provenant d'Asie.
Dans l'hémisphère Nord, un exportateur remarque que la pression sur le pouvoir d'achat des consommateurs pourrait limiter les ventes, malgré une demande accrue initiale liée à des stocks bas.
Namibie : récolte en baisse malgré des prévisions revues à la hausse
Pour la saison 2024/2025, les exportations namibiennes sont estimées à 9,3 millions de cartons, contre 9,1 millions l'année précédente. Cependant, un exportateur sud-africain indique que les volumes des variétés rouges, notamment, sont plus faibles.
Amérique du Nord : l'offre limitée soutient des prix élevés
L'approvisionnement en raisins en Amérique du Nord bascule entre régions.
Californie : les détaillants se tournent vers les raisins péruviens et, dans une moindre mesure, brésiliens. Toutefois, les raisins californiens restants devraient se vendre à l'ouest du Mississippi.
Pérou : dominant le marché jusqu'au Nouvel An, les raisins péruviens, en provenance du nord, affichent de meilleurs volumes et une qualité supérieure à la saison précédente, bien que la récolte ait pris du retard. 38 % des exportations péruviennes sont destinées aux États-Unis, contre 44 % l'an dernier.
Afrique du Sud : la récolte dans le Northern Cape est en retard d'une semaine à 10 jours par rapport à la normale. Les marchés européens et britanniques étant prolifiques, il y a peu de raisons de détourner les fruits vers les États-Unis avant Noël.
Chili : en retard d'environ 10 jours, le Chili a expédié ses premiers volumes (variétés Thompson Seedless et Prime) à la semaine 48, mais le gros des expéditions ne commencera qu'après Noël.
Les prix élevés, dus à l'offre restreinte, freinent la demande. À la semaine 49, les raisins rouges péruviens sans pépins s'échangeaient entre 36 et 38 USD par caisse, et cette tendance devrait se maintenir jusqu'à Noël.
Pays-Bas : un marché du raisin dynamique attendu tout au long du mois de décembre
Le marché du raisin connaît actuellement une demande massive. « Les volumes disponibles ont été fortement limités, notamment dans le nord du Pérou. La région d'Ica, située plus au sud, bénéficie toutefois d'une production plus importante. Par ailleurs, les approvisionnements en provenance de Namibie et d'Afrique du Sud commencent à arriver, mais je m'attends à ce que le marché reste sous tension tout au long du mois de décembre en raison d'un épuisement des stocks », explique un importateur. Les prix demeurent élevés, dépassant 2 euros par barquette. Il reste incertain de savoir comment la situation évoluera en janvier : « Le temps de transit des cargaisons en provenance d'Afrique du Sud est de deux à trois semaines. Tout dépendra des quantités expédiées à ce moment-là. »
Italie : la transition vers les raisins sans pépins s'accélère
L'Italie, historiquement leader dans la production de raisins à pépins, aspire également à devenir une référence dans le segment des variétés sans pépins, selon l'Association des opérateurs italiens de raisins de table. Dans les Pouilles, région phare de la viticulture italienne, plus de 70 % des surfaces sont désormais dédiées à ces variétés. La Sicile suit cette tendance, avec plus de 40 % de sa surface consacrée aux nouvelles variétés sans pépins. Les prix des raisins à pépins restent élevés en raison d'une réduction des surfaces cultivées.
Un producteur des Pouilles confie : « Cette saison a été positive, tant pour la récolte que pour la commercialisation. Les conditions climatiques atypiques de 2024 — hiver sec, printemps inexistant et été extrêmement chaud — nous ont inquiétés quant à la qualité des raisins. De plus, toutes les variétés, précoces comme tardives, ont coïncidé sur un court laps de temps. Cette année particulière a conduit à une baisse drastique des volumes, surtout pour les cépages traditionnels comme l'Italia. Néanmoins, la qualité élevée et les degrés Brix supérieurs à la moyenne ont permis d'atteindre des prix records. La saison s'est terminée prématurément, environ 20 jours plus tôt que d'habitude, en raison de faibles quantités, mais avec des résultats économiques extrêmement satisfaisants pour les producteurs et négociants. Les campagnes à venir seront décisives, avec l'entrée en production de nombreux hectares convertis au raisin sans pépins. L'année 2025 sera un véritable test : le marché, pourra-t-il absorber ces volumes tout en maintenant les prix élevés de 2024 ? »
En Sicile, la campagne 2024 s'est également achevée avec un mois d'avance, fin novembre. Malgré des rendements réduits, la qualité était excellente. La demande, portée par les détaillants italiens et étrangers, a été soutenue, particulièrement pour les raisins sans pépins. La tendance à arracher les anciennes variétés au profit des nouvelles se poursuit. En début de campagne, les prix étaient corrects : en moyenne 1,20 €/kg pour les raisins à pépins et 1,50 €/kg pour les variétés sans pépins. Parmi les variétés mi-tardives, Sweet Globe et Autumn Crisp (toutes deux sans pépins) se sont distinguées, atteignant une moyenne de 1,60 €/kg et plus. Les variétés à pépins, comme Red Globe et Italia, ont enregistré une moyenne de 1,25 €/kg.
« Faible et excessivement cher » : voilà comment un grossiste du nord de l'Italie résume les dernières semaines de vente des raisins italiens. Les volumes étaient réduits et les prix particulièrement élevés. Les raisins sans pépins haut de gamme atteignent 8 €/kg sur le marché de gros, un prix jugé excessif, obligeant les détaillants à revendre à 10 €/kg ou plus, ce qui freine fortement la consommation. Les variétés sans pépins à prix plus abordables, entre 4 et 5 €/kg, n'ont pas le même attrait pour les consommateurs. La demande reste accrue pour ces variétés, mais l'offre actuelle ne suffit pas à satisfaire le marché. Quant aux raisins traditionnels, ils sont en rupture de stock depuis plusieurs jours, aggravant le déficit d'approvisionnement.
À noter également la disponibilité des raisins blancs espagnols Aledo et des raisins péruviens Autumn Crisp et Red Globe sur le marché de gros.
Allemagne : une offre limitée et des prix en hausse
Le marché actuel du raisin en Allemagne est marqué par une offre restreinte et des prix élevés. Cette année, les volumes d'exportation en provenance du Pérou ont été réduits en Europe, car une part conséquente de la production a été dirigée vers les États-Unis. Les premières arrivées en provenance de Namibie sont attendues dès la semaine 50. Cependant, les prévisions annoncent une baisse de 25 à 33 % des volumes namibiens. En Afrique du Sud, en revanche, les perspectives pour la nouvelle saison sont néanmoins favorables, avec les premières livraisons attendues entre début et mi-janvier.
Espagne : des prix élevés causés par une offre insuffisante
Les importations de raisin en Espagne ont commencé à poser problème dès novembre, juste avant l'une des périodes de consommation les plus importantes de l'année : la traditionnelle campagne de la Saint-Sylvestre. Les premières expéditions en provenance du Pérou et du Brésil ont rencontré divers obstacles, entraînant des retards. Ces pays, habituellement sollicités pour compenser la fin des saisons méditerranéenne (Espagne et Italie) et américaine, ont également dû faire face à une forte demande simultanée en Europe et en Amérique du Nord. En outre, des retards de récolte et des complications dans le transport international ont accentué la baisse des volumes prévus pour novembre, une pénurie particulièrement critique ces deux dernières semaines.
Les supermarchés ont subi d'importantes ruptures de stock, et les prix ont atteint des sommets. Les importateurs ont dû composer avec une grande incertitude quant aux délais de livraison, compliquant la gestion des stocks à une période cruciale pour le secteur. Face à ces défis, le Royaume-Uni, premier marché européen, a anticipé en important par avion de gros volumes de raisins namibiens dès le début de la saison, réduisant les disponibilités pour les autres pays européens. En parallèle, l'Afrique du Sud a avancé sa saison, proposant des raisins à des prix élevés. Bien que les semaines à venir devraient offrir une meilleure régularité dans les approvisionnements, les prix resteront élevés. Certains importateurs ont accepté de payer des tarifs exorbitants pour sécuriser leurs volumes, au risque de compromettre leur rentabilité.
Semaine prochaine : la poire