Suite à l’engagement pris par les grandes enseignes de favoriser les produits locaux dans leur offre, plusieurs d’entre elles souhaitent poursuivre dans cette voie, comme Auchan, le groupement U ou encore Intermarché.
Durant la crise et le confinement, les problèmes d’approvisionnement en produits venus de l’étranger ont commencé à se faire sentir dans les rayons. De plus, les producteurs de l’hexagone se retrouvaient en difficultés à cause de la perte de certains contrats, notamment auprès de la restauration. C’est alors que les grandes enseignes de distribution ont déclaré qu’elles favoriseraient les produits locaux dans leurs supermarchés. « Elles ont été bien contentes de trouver des fournisseurs prêts à regarnir rapidement leurs rayons de farine, d’œufs ou de fruits dévalisés », précise Sébastien Windsor, président des chambres d’agriculture (APCA).
Si certains ont vu dans cette manœuvre un coup publicitaire pour redorer leur image, les enseignes semblent vouloir aller plus loin. Les plus engagées seraient même Intermarché, Système U, mais aussi Auchan. Elles souhaitent en effet conserver les liens créés avec les producteurs locaux lors du confinement. A Sainte-Maure-de-Touraine, par exemple, le directeur l’Intermarché a proposé à Mathieu Léger, un producteur de fromage installé au cœur de l’appellation en Indre-et-Loire, de continuer à vendre ses produits en magasin alors qu’il ne le faisait pas avant la crise.
Cet volonté de pérenniser les partenariats locaux est aussi dû à l’engouement des consommateurs pour ces produits fabriqués près de chez eux. « Ces derniers sont plus rassurants qu’une grande marque industrielle, car on en connaît l’origine », analyse Olivier Dauvers, expert de la distribution. Déjà en avril dernier, une enquête de Kantar indiquait que 85 % des Français disaient privilégier les produits alimentaires tricolores et 79 %, les produits locaux. De même, les filières de vente directe n’ont jamais été aussi en vogue que maintenant. « Dans la cinquantaine de drives fermiers de notre réseau, nous sommes passés pendant la crise de 1 600 à 6 000 commandes par semaine », précise Jean-Marie Lenfant, président délégué de Bienvenue à la ferme.
Un sondage Ipsos paru l’an dernier indiquait que 92 % des Français souhaitaient que les enseignes référencent davantage de produits locaux, et 94 % estimaient que les producteurs y seraient gagnants. Les grandes enseignes semblent avoir entendu le message et veulent désormais faire leur part pour aider les français à manger sain et redynamiser nos campagnes.
Les chaînes d’indépendants comme Intermarché, Système U ou Leclerc ont une longueur d’avance dans cette mission puisque chaque magasin est libre de son assortiment. « Mes fournisseurs locaux livrent en direct et je les paie moi-même. Ils ne passeront par la centrale d’achats régionale que s’ils peuvent livrer un plus grand nombre de points de vente », explique Grégory Vouters, patron de deux Système U près de Rodez (Aveyron). Être référencé chez les succursalistes est donc plus complexe, et les producteurs capables de faire du volume sont ainsi privilégiés. Sans compter que les grandes surfaces imposent de nombreuses contraintes techniques.
Certains acteurs du milieu ont déjà créé des agences afin d’aider les producteurs à répondre aux exigences des grandes surfaces. Ainsi, François Henry, un ancien manager de Bel, a lancé récemment sa start-up, Tout près d’ici, pour aider les producteurs à se faire référencer, assurer le suivi commercial et faire de la pub sur le lieu de vente. « Depuis qu’elles travaillent avec nous dans le Nord, une vingtaine d’exploitations agricoles ont augmenté leur chiffre d’affaires mensuel de 5 000 euros environ », indique-t-il. En Île-de-France, une entreprise similaire, Direct Market, gère depuis l’an dernier la logistique et la facturation d’une centaine de producteurs de fruits et légumes en lien avec une cinquantaine de points de vente. « Nous proposons aussi des bacs spécifiques en magasin pour accroître la visibilité », précise son cofondateur, Stéphane Pelka. Mais les agriculteurs savent de plus en plus se prendre en charge eux-même. C’est le cas de Jean-Michel Péard, cofondateur de Invitation à la ferme, créée il y a cinq ans par des éleveurs bio. « 37 fermes font partie du réseau et nous visons les 60 l’an prochain », précise-t-il.
Il restera néanmoins un travail à faire au niveau des prix car on a pu constater que les consommateurs n’ont pas apprécié les grands écarts de coûts entre les produits locaux et ceux fabriqués à l’étranger. Cela passera par la communication car le local sera toujours plus cher qu’un produit standardisé. En effet, les fruits et légumes français ne pourront pas rivaliser avec les prix de la fraise espagnole ou de la tomate marocaine, deux à trois fois moins chère.
Source : capital.fr