En Irak, 50 % des besoins alimentaires sont importés alors que la principale source économique du pays est l’agriculture. « Depuis des années, les cultivateurs travaillent à perte, sans aucun soutien de l’Etat », indique Ahmed Mohsen, ingénieur agricole et producteur de melons à Afak.
Le pays possède 32 postes-frontières vers l'Iran, la Turquie, la Syrie et la Jordanie, par lesquels passent les denrées alimentaires. Grâce aux exportations vers l’Irak, l'Iran et la Turquie récoltent chaque année respectivement 2,8 et 2,2 milliards de dollars (2,5 et 1,9 milliards d’euros). Une concurrence écrasante pour les producteurs irakiens qui préfèrent laisser leurs terres en jachère plutôt que de travailler à perte.
Mais depuis la crise du coronavirus, le gouvernement a fermé les frontières ; une action qui a favorisé indirectement les producteurs. Les autorités « n'avaient pas l'intention d'aider les agriculteurs, mais elles nous ont permis de prouver que nous pouvions combler les besoins alimentaires des Irakiens », poursuit l’ingénieur agricole. Le pays a même réussi cette année à être autosuffisant sur 28 produits, selon Mohammed Kechache, président de la confédération agricole de Diwaniya.
Les producteurs sont ravis d’avoir pour la première fois une chance de pouvoir concurrencer les produits étrangers avec les leurs « de meilleure qualité que les importations », estime Hani Cheïr qui cultive melons, pastèques, aubergines, concombres et tomates. Par manque de concurrence, les prix ont pu baisser, rendant plus accessible la marchandise nationale.
L’économie de l’Irak est quasi entièrement contrôlée par l’Etat. D’habitude, les producteurs vendent leur production à des coopératives d'Etat à un prix plus cher que celui du marché. Celles-ci revendent ensuite les récoltes. Mais « chaque année, l'Etat tarde à payer les agriculteurs et leur fait encaisser des pertes », précise Khachan Kariz, 70 ans, qui cultive des dizaines d'hectares de céréales. Avec la crise, il a aujourd'hui pu vendre ses produits directement sur les marchés de gros, en argent comptant.
Le producteur espère que Bagdad va « empêcher les importations pour soutenir financièrement et moralement les cultivateurs irakiens ». Un espoir qui semble se concrétiser avec le ministère de l'Agriculture venant d’interdir l'importation de 25 fruits et légumes. Cependant, les produits des pays voisins continuent de se frayer un chemin sur les tables irakiennes, à prix cassés.
Source : ouest-france.fr