Guillaume Riou, président de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB) et polyculteur-éleveur dans les Deux-Sèvres, s’est entretenu avec le journal Ouest-France pour évoquer de l’avenir de l’agriculture bio.
Dans l’interview, il souligne la progression constante du bio qui est sorti « du marché de niche ». Avec un rythme de croissance du chiffre d’affaires de + 1 à + 1,5 milliard par an, le bio représentait 12,5 milliards à la fin de l’année 2019. « Dans cinq ans, nous en serons à 20 milliards. La transition écologique est en marche, tout le monde en est bien conscient », confie-t-il. Cependant, il reconnaît qu’il sera difficile d’atteindre « l’objectif fixé de doubler le bio d’ici à la fin du mandat, pour atteindre 15 % de la surface agricole utile (SAU) : aujourd’hui, nous en sommes à 8,5 %, peut-être arriverons-nous à 10 ou 11 % de la SAU, en 2022 ». En effet, pour répondre à cet objectif, il faudrait selon lui doubler les conversions en bio qui se font au rythme d’environ 300 000 ha/an.
Le président de la FNAB se réjouit des recrutements dans le secteur biologique : « Aujourd’hui, beaucoup de jeunes s’installent en bio : le bio recrute ! Nous avons besoin de salariés. Mais il va aussi falloir renouveler le monde paysan : 50 % de départs dans les dix ans… 10 millions d’hectares vont être libérés ! Cela peut représenter 100 000 fermes de 100 ha… Ça en fait du monde et des emplois. C’est un bel enjeu d’aménagement du territoire, de socio-économie du monde rural… Autre point fort, le bio attire les femmes : elles représentent un bon tiers des nouvelles installations ».
Il confie que la pandémie de Covid-19 a mis l’accent sur les enjeux liés à la santé et le désir d’atteindre le « zéro pesticide ». Cela pourrait se traduire par de la mécanisation alternative.
Lorsqu’on l’interroge sur un éventuel étranglement du marché, il répond que, « pour le moment, il n’y a pas de déséquilibre, les prix restent soutenus. Et je ne suis pas du tout choqué de voir, dans les grandes surfaces, des produits bio au même prix que du conventionnel : tout le monde doit pouvoir avoir accès, désormais, au bio ».
Il envisage cependant des changements profonds dans la manière d’appréhender l’alimentation dans notre société : « l’alimentation ne représente plus que 13 % du budget familial, contre 26 % voilà soixante ans. Je pense que nous allons faire machine arrière. Avec le confinement, cette période d’introspection forcée, les consommateurs ont repris plaisir à cuisiner de bons produits, avec leurs enfants. La preuve : la demande en farine bio a explosé de 600 % ! Ça va laisser des traces. Comme pour les circuits courts : le bio et le local vont ensemble ».
Source : ouest-france.fr