Avec la crise actuelle autour du coronavirus, la filière de la pomme de terre est en train de perdre de nombreux marchés de vente.
Dans toute l’Europe, les ventes à la restauration, aux cuisines industrielles et à la restauration rapide ont cessé. De plus toutes les ventes prévues pour les grands événements des prochains mois (compétitions sportives, festivals, folklore…) sont annulées. Même les ventes vers les destinations lointaines ont chuté… Pourtant, on remarque que la consommation à domicile s'est renforcée et la vente de produits surgelés et de chips dans les supermarchés européens se poursuit très bien.
Mais ce segment de clientèle ne représente qu’une partie des nombreux débouchés habituels de la filière et il ne couvre pas les diminutions causées par la perte de l’exportation et de la consommation extérieure.
En Belgique, les stocks de produits finis congelés s’accumulent, même si les transformateurs de pommes de terre belges tentent de respecter leurs engagements auprès des producteurs. On trouve beaucoup de pommes de terre libres de tout contrat chez les producteurs, qui représenteraient environ 30 et 35 % des stocks résiduels. Elle sont quasiment sans valeur, étant donné qu'il s’agit d’un produit à la durée de conservation limitée. Cela constitue un risque entrepreneurial imprévisible et exceptionnel.
Dans les Hauts-de-France, près 500 000 tonnes de pommes de terre pourraient ne pas être transformées, faute de débouchés industriels. « C'est durant cette 3e semaine de confinement, que les conséquences des changements de consommation se sont faites ressentir, après la fermeture des restaurants, des friteries, des cantines... Les stocks augmentent, les transporteurs ne viennent plus faute de commandes. Le produit frais s'en sort un peu mieux mais les stocks pour les industriels nous font craindre le pire », explique Nicolas Loingeville, exploitant agricole à Sercus et vice-président de la FDSEA.
Néanmoins, les usines de transformation continuent de tourner pour assurer la chaîne d'approvisionnement : « Nous fabriquons maintenant essentiellement pour la grande distribution puisque les petits commerces de « food service » ont fermé. Notre volume a augmenté d'un côté et diminué de l'autre, l'effet vase communiquant joue son rôle dans notre production. Nous allons assurer toutes les commandes passées aux 1 500 agriculteurs producteurs de pommes de terres, français et belges qui composent nos fournisseurs. Tous les contrats prévus avant la crise, seront honorés », commente Raphaël Tassart, chargé de la communication pour Clarebout Patatoes Warneton (France).
Mais sur le marché, les prix se sont effondrés avec la fermeture des frontières. « De 140 € la tonne nous sommes passés à 25 € ! C'est 4 fois en dessous du coût de production. Cette crise a bouleversé le marché, les habitudes de consommation. Seuls, les agriculteurs qui vendent des produits frais s'en sortent mieux. On espère tous que les contrats passés avec les industriels avant la crise vont tenir. J'ai actuellement 500 tonnes qui doivent partir mais si ce n'est pas le cas, avant l'été, il me faudra trouver d'autres solutions », détaille Denis Delestrez, agriculteur à Fleurbaix.
De plus, certains agriculteurs n’ont pas les moyens de stocker leurs pommes de terre dans de bonnes conditions : « La pomme de terre est un produit périssable, qui se dégrade en qualité et la conserver jusqu'à cet été doit se faire à 7 voire 8° maximum. Aujourd'hui, nous sommes déjà dans la plantation de la prochaine récolte pour cet autonome. On nous a conseillé de moins planter pour ne pas aggraver cette situation d’invendus », précise Denis Delestrez.
Pour écouler les stocks, la filière envisage l’alimentation du bétail, le don aux associations, et la méthanisation, etc. De même que la possibilité de rouvrir les féculeries qui produisent de l’amidon pour l’industrie agro-alimentaire.
Aux Pays-Bas, cette production est d'environ 4 millions de tonnes par an, dont un quart est exporté. L’organisation agricole du pays, LTO, estime à 6 milliards d’euros les pertes causées par les conséquences de l'épidémie du Covid-19.
Source : francetvinfo.fr / sillonbelge.be