« Réagissez pour mettre fin à cette injustice et distorsion de concurrence, pour ne pas voir disparaitre une petite filière de 300 producteurs répartis sur grande partie du territoire français », plaident l'Association Nationale des Producteurs de Noisettes (ANPN) et la coopérative Unicoque. Après la filière pomme, c'est autour de la filière noisette, fortement touchée par les attaques de ravageurs, d'appeler à une issue favorable au vote de la loi « lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur » (actuellement en examen en commission des affaires économiques à l'Assemblée nationale) et notamment son article 2 qui permet la mise en place d'une dérogation pour l'utilisation de l'Acétamipride. Le Collectif Sauvons les fruits et légumes de France monte aussi au créneau ; dans un communiqué publié hier, il demande aux parlementaires de tenir leurs engagements.
© Unicoque
A l'initiative du sénateur Duplomb la Proposition de loi visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur prévoit notamment la réintroduction de dérogation de l'acétamipride (néonicotinoïde), pour certaines filières, interdits en France depuis 2018, mais autorisé en Europe jusqu'en 2033
Distorsions de concurrence
Autorisé dans les pulvérisateurs anti-moustique, dans les colliers anti-puce pour chien ou encore comme anti-mouche dans les élevages bovins, l'acétamipride est pourtant interdit en usage agricole dans l'Hexagone. Problème ? La France est le seul pays de l'UE à interdire cette molécule en usage agricole. « Elle est autorisée et utilisée par nos collègues producteurs de noisettes du monde entier, dont l'Italie ou l'Espagne. Et nous, producteurs de noisettes français ne pouvons plus pulvériser un produit à base d'acétamipride dans nos vergers de noisetiers. Cette injustice et distorsion de concurrence durent depuis 4 ans ! »
« En l'absence de celle-ci, la filière est à la merci de ses ravageurs, alors que la France laisse entrer sans contrôle les noisettes de pays largement moins-disant sur le plan environnemental, en particulier la Turquie et son usage de 244 produits insecticides dont plusieurs dizaines interdites en Europe depuis plus de 20 ans » .
« Chute des rendements et de la qualité »
© ANPN« La lutte contre le balanin et la punaise diabolique sera inexistante à partir de 2026 puisque plus aucune molécule n'aura d'AMM en France sur la culture du noisetier. Les solutions alternatives émergentes grâce aux travaux de l'ANPN ne sont pas déployables à grande échelle à ce jour », préviennent les deux entités. L'acétamipride permettrait donc « la transition progressive vers les méthodes alternatives grâce aux lâchers de microhyménoptères parasitoïdes, méthode de biocontrôle que la filière, avec l'aide de la région Nouvelle Aquitaine et de l'Etat, développe depuis 2015 ».
En 2024 les attaques de punaises diaboliques et de balanins avaient eu raison de la production de noisettes. Près de 50 % de la récolte avait été détruite (sur un potentiel de
© ANPNproduction de 13 000 tonnes, seules 6 500 tonnes avaient pu être récoltées). Et sur cette récolte amputée de moitié, 30 % n'avaient pu être commercialisées car « impropres à la consommation ». En février 2024 en marge du SIA, Unicoque et l'ANPN avaient écrit au président de la République pour demander la réintroduction de l'insecticide.
La filière pomme, elle, est aux prises avec le puceron cendré, dont les attaques sont cette année sans commune mesure. L'ANPP a annoncé le mois dernier entre -10 et -30 % de récolte pour la prochaine campagne.
« Pour une dérogation raisonnée, fondée sur la science »
« Cette molécule a été interdite pour l'usage en production végétale agricole par une loi, par la main du politique, non pas par la science ». La coopérative et l'association rappellent d'ailleurs que « l'Agence européenne de sécurité sanitaire (EFSA) a confirmé dans son avis du 15 mai 2024 l'autorisation de l'acétamipride sur tout le territoire européen jusqu'en 2033 et que son homologue française, l'Anses, n'a jamais retiré l'AMM de cette molécule, c'est le politique par la loi qui l'a fait ». Elles attendent ainsi un vote favorable des députés qui permettrait donc à l'acétamipride d'obtenir une dérogation comme le prévoit l'article 53 du règlement (CE) n°1107/2009 ; pour répondre à une situation d'urgence en matière de protection phytosanitaire. « Cette dérogation peut être accordée par le ministre chargé de l'agriculture, compétent sur cet article ». « Nous ne demandons que l'application équitable des conditions règlementaires régissant notre production ».
© Unicoque
« Un déferlement de fake news »
L'ANPN et Unicoque dénoncent un « déferlement de fake news de la part des lobbys écologistes internationaux. Depuis quelques jours en effet, nos parlementaires se voient la cible de milliers de mails visant à les influencer dans leurs prises de décision concernant la proposition de loi. Une majorité de députés de la commission du Développement durable a lancé la semaine dernière un très mauvais signal au monde agricole : ils ont purement et simplement supprimé l'article 2 de la proposition de loi, prévoyant une dérogation pour l'usage de l'acétamipride. Alors même que, sur ce point, le texte sorti du Sénat était parvenu à une solution d'équilibre ». Face à cette situation, la filière noisette demande aux députés de « voter en faveur de la disposition prévue dans ce projet de loi qui : harmonisera les règles phytosanitaires pour une production de noisette durable en Europe. Un même marché, des mêmes règles pour la souveraineté alimentaire. Donnera le dernier mot à la science sur l'usage de cette molécule par la décision de l'ANSES sur l'homologation en France ».
Pour plus d'informations :
ANPN
"Lamouthe" BP 10
47290 CANCON
Tél. : +33 (0)5 53 01 60 08
anpn.eu