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Europe : Après la surproduction et les prix bas, un bel avenir pour la pomme de terre ?

© Francisco MoyaAlors que la filière de la pomme de terre fait actuellement face à des changements structurels pouvant parfois fortement déséquilibrer le marché et semer le doute au sein des producteurs, Francisco Moya – Directeur Général du Réseau Vitalis –, porte un regard résolument optimiste sur le long terme à propos de ce marché qui se mondialise et qui pourrait offrir de multiples opportunités à qui saura les saisir. « Même si le marché français et européen connaît de grosses difficultés actuellement, d'un point de vue macroéconomique, la pomme de terre s'inscrit dans une dynamique positive en termes de marché, de déboucher, d'évolution de la consommation et ce à l'échelle mondiale. Cela fait quelques années que la demande dépasse structurellement les 4-5 % de croissance annuelle ».

Une consommation en nette augmentation à l'échelle mondiale
Une augmentation significative liée à plusieurs facteurs : « Un certain nombre de changements de comportements en termes de consommation sont en train de s'opérer à travers le monde. En Amérique du Sud, en Asie, en Europe, la consommation de pommes de terre augmente car le développement de nouveaux modes de consommation type fast-food prend de plus en plus de place dans les habitudes. Depuis ces 15-20 dernières années, les besoins de l'industrie ont explosé, ce qui a révolutionné la filière et créé de nouveaux flux à l'échelle mondiale. D'autre part, la pomme de terre a été identifiée par la FAO en 2008 comme une culture intéressante pour contribuer à nourrir la population mondiale tout en ayant un impact mesuré en termes de gestion de l'eau, des sols et d'utilisation de produits phytosanitaires ».

Une croissance impulsée par la demande de l'industrie
Face à ce changement de comportement alimentaire à l'échelle mondiale, principalement induite par une augmentation fulgurante de la consommation de frites surgelées, l'industrie de la transformation s'est fortement développée, engendrant ainsi augmentation de la production : « Un certain nombre de pays comme l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et dans une moindre mesure la France, ont donc commencé à développer il y a une quinzaine d'années leur industrie de transformation. Un développement renforcé par un effet d'accélération lié à la demande mondiale en croissance et cet appel d'air sur les pays d'Amérique du Sud et d'Asie. La filière industrielle en Europe s'est d'autant plus développée qu'elle s'est retrouvée avec une certaine compétitivité et un savoir-faire pour répondre à la demande de ces marchés. Ainsi depuis 4-5 ans, la Belgique est devenue leader dans l'industrie de la pomme de terre, avec une capacité de transformation allant même au-delà de sa capacité de production. La France n'est cependant pas en reste, avec l'implantation d'usines qui continuent aujourd'hui de s'agrandir. Depuis une dizaine d'années, la production française ne cesse par ailleurs de croître pour répondre au besoin exponentiel de la transformation ».

Une analyse du marché qui doit désormais se faire au niveau macroéconomique
Face à de tels changements suscités par une croissance exceptionnelle de la demande à l'échelle mondiale, il est selon Francisco Moya tout à fait normal d'avoir un effet d'ajustement de la production entre l'offre et la demande. « C'est dans ce contexte que nous devons analyser la situation. Nous ne sommes pas sur un marché stable et constant mais en perpétuel mouvement. On peut donc tout à fait avoir un manque de pommes de terre car la demande en produit transformé est énorme et dans d'autres cas un trop plein de tubercules car nous répondons désormais à un marché mondialisé. La réalité entre l'offre et la demande n'est plus uniquement arbitrée sur des besoins européens comme on l'a connu historiquement avec un marché qui fonctionnait en vase clos. Avant, les cours étaient élevés quand il y avait un manque de produits, et inversement. Le marché se régulait par lui-même. Mais cette équation est en train de changer car aujourd'hui les arbitrages ne sont plus uniquement européens mais mondiaux. Désormais, on peut se retrouver devant des cas de figure où la production est déficitaire en Europe, laissant donc supposer des tarifs plus élevés pour les producteurs européens. Mais dans un contexte de marché mondial, la pomme de terre européenne n'est pas forcément compétitive avec des prix élevés. C'est donc une analyse qu'il faut désormais faire au niveau macroéconomique ».

France : de nombreux atouts pour relever les défis de ce nouveau marché mondialisé
Loin d'être défaitiste, Francisco Moya s'évertue à montrer les avantages dont l'Europe bénéficie dans ce nouvel état des lieux : « Nous avons la chance d'avoir un marché moderne et qui se développe. Dans cet échiquier mondial du besoin de la pomme de terre, le Nord de l'Europe a été identifié comme étant l'une des 3-4 régions du monde où la production de pommes de terre destinée à l'échelle mondiale est pertinente et la mieux adaptée. Nous sommes donc localisés dans une région du monde qui a de l'attractivité pour la production de ce tubercule et en France, nous avons une réserve foncière importante et supérieure à celle de nos voisins belges et hollandais. Ce qui nous donne un certain nombre d'atouts et pas que pour la pomme de terre transformée, mais aussi pour le frais, la fécule qui est loin d'être négligeable, la semence et les plants certifiés – point très important pour le développement de la filière. Nous avons donc un certain nombre de débouchés possibles pour la production comme pour le commerce ».

Côté logistique, la France tire également son épingle du jeu : « Nous sommes au centre névralgique de l'Europe au niveau logistique. Là encore, nous avons la chance de pouvoir exporter sur une vingtaine de pays, ce qui ouvre beaucoup de portes d'entrée et permet à chaque producteur d'avoir un déboucher pour sa récolte ».

En adoptant une stratégie de diversification, la consommation dans le secteur du frais peut augmenter en termes d'UVC
Autre atout pour les producteurs français de pommes de terre fraîches, la diversité des bassins de production : « En France par rapport à d'autres pays, nous avons la chance d'avoir une diversification de bassins de productions très importante. Nous avons également la chance d'avoir un territoire très sain, lié à l'utilisation très importante de plants certifiés. Nous avons aussi de très bonnes techniques de conservation et une très bonne maîtrise de nos productions. Aujourd'hui, notre pays est reconnu dans le monde comme étant un de ceux qui produit les meilleurs tubercules ».

« Nous sommes convaincus chez Vitalis que le secteur frais de la pomme de terre a sa place dans les linéaires. En termes de réponse aux attentes, ce produit sain et frais coche un certain nombre de cases. A nous maintenant de nous adapter à l'évolution de la consommation, liée à des critères démographiques, à un changement de consommation au sein des familles qui disposent de moins de temps pour cuisiner. Une adaptation qui peut se faire par la segmentation de notre produit au niveau de la variété, du packaging, l'offre de produits locaux, naturels, qui répondent à une certaine saisonnalité etc. Autant de points qui façonnent notre stratégie dans le but de répondre à cette demande en pleine évolution. Car oui, il peut y avoir une érosion de la consommation en frais, mais elle peut augmenter en termes d'unité de vente consommateur. Ce qui nous permet d'adopter une véritable stratégie au niveau de la production en fonction des variétés que l'on plante, d'adapter ainsi notre offre à la demande et de limiter les risques. C'est en tout cas le message que nous véhiculons auprès des producteurs ».

Arbitrer en fonction de la valorisation plutôt que de la volumétrie
Loin de dire que l'avenir est facile pour les producteurs, il est tout de même selon Francisco Moya rempli d'espoirs : « Il faut arriver à se détacher de la réalité d'un quotidien et prendre de la hauteur. Quand on augmente de manière significative les volumes produits, on amplifie aussi naturellement le risque. La pomme de terre est aussi quelque part victime de son succès au niveau agricole. Il n'est pas anormal que les producteurs s'intéressent à la culture qui bénéficie d'un marché dynamique en termes de demande et qui est plutôt rémunératrice ces 5-10 dernières années. Ce qui peut provoquer une certaine concurrence entre les nouveaux entrants. Même s'il est possible que la situation soit négative d'un point de vue tarifaire à un instant T, il ne faut pas perdre de vue que la pomme de terre a énormément de potentiel et surtout en France. Notre rôle est aussi d'avoir une vision sur le moyen-long terme de la filière, et de ne pas rester le nez dans guidon à se demander à quel prix on vendra sa production demain. Chaque entreprise doit adopter une stratégie très fine et trouver sa place sur le marché avec un positionnement clair. C'est l'avantage de la contractualisation, un producteur qui vend sous contrat sait à qui il destine ses produits. Il faut essayer d'arbitrer en fonction de la valorisation, plutôt qu'en fonction des variétés destinées à fournir de la volumétrie et qui seront toujours tributaires des aléas du marché ».

« Notre travail, c'est de convaincre les clients de ne pas changer de boussole, avec un produit de fond de rayon qui respecte le prix de revient au producteur. De l'autre côté, nous poussons les producteurs à se positionner sur un marché et à contractualiser leur production, en cherchant à adopter une stratégie de diversification qui soit la plus large possible. Tout l'enjeu consiste à trouver le bon équilibre entre l'offre et la demande. Et trouver cet équilibre, c'est ce qui s'appelle travailler en filière. D'où l'intérêt d'avoir une vision collective et l'importance de créer une filière structurée. A nous maintenant d'agir pour que ce contexte de marché en pleine mouvance nous soit bénéfique ».

[Article publié dans le magazine Primeur X FreshPlaza du début du mois d'octobre]

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