À Ica, département péruvien qui représente à lui seul plus de la moitié des exportations de raisin de table du pays, Cristóbal Cillóniz s'est engagé depuis trois ans dans cette culture emblématique de la région, en fondant son entreprise Agrícola Procom et en plantant une parcelle de 90 hectares.
Depuis novembre 2024, le projet fait partie du groupe Rocio, un des groupes agroalimentaires les plus diversifiés du Pérou. « Avec des activités dans les filières myrtilles, avocats, asperges, volaille et bétail, le groupe a décidé en 2024 de se lancer à fond dans le secteur du raisin de table », explique Cillóniz, copropriétaire de Talsa Grape Farms, l'entité chargée de la production et de la commercialisation des raisins de table du groupe.
© FreshPlaza
Cristóbal Cillóniz
Au domaine La Huerta, Cillóniz a misé à 100 % sur Autumncrisp, une variété brevetée qui s'est imposée dans le monde entier pour sa saveur, sa taille et sa texture croquante. « Autumncrisp donne d'excellents résultats à Ica. »
Actuellement, 83,5 ha sont plantés et 100 ha supplémentaires en voie de l'être. Au cours de la première année de production - 13 mois après la plantation, la première récolte a eu lieu. Le rendement par hectare a atteint 2 000 boîtes et la saison prochaine, qui sera la troisième année de récolte, il en atteindra 4 500.
Cependant, la stratégie n'exclut pas l'expérimentation. Dans de petites parcelles, des essais semi-commerciaux de Sugra 54 et Sugra 56 sont en cours. Dans une autre exploitation de l'entreprise, située à Pisco, à quelque 120 kilomètres de là, on cultive également Sweet Globe, Sweet Celebration, Cotton Candy, Ruby Rush et Candy Hearts.
Des marchés en mutation et des consommateurs exigeants
Les États-Unis absorbent entre 50 et 60 % des fruits exportés par Talsa Grape Farms. « C'est notre marché le plus important et Autumncrisp y est très bien accepté. » La marque principale est Talsa Grape Farms, bien que des clients tels que Costco, Publix et d'autres exigent des emballages sous leur propre marque. 50 % des fruits sont expédiés dans des colis vrac de 8,2 kg et 50 % en barquettes.
© FreshPlaza
Les raisins Autumncrisp du domaine La Huerta seront récoltés à partir du 10 décembre (photo prise à la fin du mois d'octobre)
L'exportation vers les États-Unis implique un droit de douane de 10 %, un facteur qui affecte la rentabilité. « Cela nous affecte, bien sûr. S'il augmente ou si le rendement n'est pas assez compétitif, nous devrons réorienter les fruits. Mais cette redistribution ne peut pas être massive : les autres destinations n'ont pas la capacité d'absorber ce volume au même niveau de prix. »
L'Asie, en particulier les pays d'Asie du Sud-Est et le Japon, gagne en importance. « Ce sont des marchés très exigeants en termes de calibre, d'apparence et de limites de pertes, mais lorsque vous respectez tout, ils paient très bien. L'Europe a moins de poids, en partie à cause de la concurrence de l'Afrique du Sud dans certaines fenêtres commerciales. Le Mexique est un marché attrayant, bien qu'instable en raison d'épisodes d'offre excédentaire. »
« En outre, les tendances ont évolué rapidement. En 2018, la totalité de notre récolte d'Autumncrisp était destinée à la Chine. Aujourd'hui, c'est presque zéro. La production intérieure chinoise, en particulier celle du muscat Shine, a drastiquement réduit la demande de raisins importés. »
Conditionnement externalisé et investissements futurs
Actuellement, Talsa Grape Farms fait emballer ses fruits en externe dans des stations de conditionnement. « Une telle installationen propre est en cours d'évaluation, mais nous préférons investir les ressources dans une plus grande surface de production. L'investissement est d'environ 7 millions de $ pour cet outil que nous n'utiliserions que trois ou quatre mois par an. Nous favorisons pour l'instant, les alliances stratégiques : co-investir dans des cellules ou des lignes de traitement avec des tiers. »
© FreshPlaza
Actuellement, le domaine La Huerta compte 83,5 ha de raisins Autumncrisp
L'eau : la limite d'Ica
Le principal problème du secteur à Ica est l'eau. « Les aquifères baissent et la conductivité augmente. C'est un signal d'alarme. Ici, nous n'avons pas de projets hydrauliques d'État - comme à La Libertad et Arequipa - et il est interdit de forer de nouveaux puits. Chaque année, entre janvier et avril, les rivières Pisco et Ica transportent d'importants volumes d'eau qui finissent dans la mer sans être utilisés. C'est dommage. Nous pouvons construire des barrages avec des investissements privés, mais la volonté politique fait défaut. Sans infrastructures hydrauliques, la durabilité agricole est menacée. »
Un autre défi est la disponibilité des travailleurs. La simultanéité entre l'éclaircissage du raisin et le pic de récolte des myrtilles - une autre culture à forte intensité de main-d'œuvre - génère une bataille du personnel. « Rien que dans le domaine de La Huerta, les 83,5 ha nécessitent 400 personnes pour la récolte. La croissance des myrtilles a été explosive, ce qui met à rude épreuve l'ensemble du marché du travail agricole. »
Contrôler la qualité, pas le marché
Selon Cillóniz, la clé de l'avenir réside dans la qualité et l'efficacité, et non dans le contrôle des prix. « Les variétés brevetées permettent d'éviter l'offre excédentaire que nous avons connue avec Red Globe, comme cela s'est produit avec les asperges ou les avocats. En fin de compte, le gagnant est celui qui produit une bonne qualité, en bonne quantité et à un bon coût. »
L'objectif est clair : 500 ha de raisin de table en quatre ans, une diversification modérée des variétés et une exploitation capable de s'adapter rapidement aux aléas du marché international. Malgré les défis, Cillóniz reste optimiste. « Si nous travaillons bien au champ et que nous maintenons la qualité, il y aura toujours un marché prêt à payer pour de bons raisins. »
Pour plus d'informations :
Cristóbal Cillóniz
Talsa Grape Farms SAC
[email protected]
www.talsa.com.pe