À Saint-Vincent-sur-Jard, en Vendée, Abderrahim Oufaquir, gérant de SCEA Les Petites Métairies, a engagé son exploitation dans un virage stratégique. Producteur de tomates sous serre depuis de nombreuses années, il recherchait une culture capable d'assurer la rentabilité future de l'entreprise et de constituer une base solide pour la reprise annoncée par sa fille. « Je voulais trouver un produit original, porteur d'avenir et avec un vrai potentiel économique pour transmettre à ma fille une structure viable dans laquelle elle éprouve du plaisir à travailler », explique-t-il. C'est dans cette réflexion qu'est née l'idée d'introduire le pitaya sous serre : une première mondiale.
© Aurélie Pintat | FreshPlaza.fr
Un projet mûri durant deux années d'observation
Si certains qualifieraient ce projet de pari fou, il est en réalité l'issue d'une réflexion mûrement réfléchie. « J'ai découvert le pitaya en Espagne et au Maroc, c'est là que j'ai eu l'idée d'en adapter la culture à nos modes de production et à notre climat en France. Cela m'a fait penser aux premières fraises qui ont été cultivées sous serre en Bretagne. A l'époque c'était révolutionnaire, aujourd'hui cela apparait comme banal. Le pitaya est par ailleurs une culture qui a de l'avenir puisqu'il se popularise de plus en plus et que le marché est en croissance constante. Pour preuve, tous les producteurs espagnols que j'ai rencontrés constataient une demande systématiquement supérieure à l'offre qu'ils avaient ». Deux années de visites, de recherches et d'échanges techniques permettront ensuite de structurer un projet jusque-là inédit.
Adapter une culture tropicale à un modèle hors-sol français
Traditionnellement cultivé en pleine terre, le pitaya nécessite une adaptation complète pour être conduit en hors-sol. « Le pitaya est issu d'un cactus, qui peut vivre une vingtaine d'années. Avec la société Dumona, nous avons voulu développer un substrat spécifique, capable de durer au moins dix ans tout en assurant un drainage optimal ». Autre spécificité de la culture, la plante met traditionnellement 12 à 18 mois avant de « retomber », ce qui marque le début de la floraison et donc de la fructification. Mais pour réduire ce temps afin d'entrer plus vite en production, Abderrahim Oufaquir a choisi de faire une plantation sur gouttières déjà à deux mètres de hauteur : « Les plantations faites en mars 2025 ont donné leurs premières fleurs dès la fin de l'été, ce qui nous a donc permis de gagner un temps précieux ». Et pour favoriser un épanouissement optimal de cette plante à jours longs, le producteur a choisi un éclairage nocturne et léger.
© Abderrahim Oufaquir
Un objectif de 80T/ha de production
Toujours dans cette optique de cultiver une nouvelle variété qui soit avant tout rapidement rentable, Abderrahim Oufaquir a fait le choix de planter directement sur un hectare dès la première année, afin de proposer des volumes significatifs à ses partenaires commerciaux. La densité, héritée de la configuration des serres initialement construites pour cultiver des tomates, permet une occupation optimale de l'espace. « Les premiers fruits ont été récoltés en septembre. La plante étant encore en phase d'installation, les volumes restent modestes, mais progressent régulièrement. L'objectif est d'atteindre environ 80 tonnes annuelles lorsque la plantation sera pleinement productive ». La fenêtre de production devrait s'étendre de mars-avril à novembre-décembre, avec un creux hivernal lié aux températures. « J'aurais aimé être présent pendant la période hivernale, mais pour l'instant ce n'est pas possible. Ce calendrier nous permet tout de même d'être présents sur le marché avant que la campagne espagnole ne commence et une fois qu'elle est terminée ».
L'exploitation est conduite en lutte biologique et n'utilise aucun produit chimique, un choix assumé pour positionner le pitaya vendéen sur un segment premium.
© Abderrahim Oufaquir
Une production française positionnée sur le haut de gamme
En cultivant du pitaya en France, l'objectif est de proposer un fruit qui se distingue des autres origines par sa qualité. Un objectif qui semble déjà bien engagé au vu des premiers résultats obtenus : « Les dégustations réalisées sur nos premiers pitayas sont très prometteuses. Nous avons fait des tests à l'aveugle, qui ont confirmé un avantage qualitatif notable. Notre pitaya est plus parfumé et plus sucré que certains produits importés, avec un taux de sucre pouvant atteindre les 15 à 16° Brix. Sachant que nous ne sommes qu'au début de la culture et que nous avons encore une marge de progression ».
Diversification : premiers essais en transformation
© Abderrahim OufaquirSeul bémol pour l'instant identifié, une production irrégulière : « C'est le souci que nous rencontrons actuellement, des semaines nous avons de beaux rendements et d'autres des trous dans la production, ce qui apporte certaines complications au niveau de la logistique et vis-à-vis des clients de la GMS notamment qui privilégient la régularité. Mais ce n'est que le début et nous travaillons sur ce point afin d'y remédier ». En parallèle, pour absorber ces pics de production, des essais de transformation ont été réalisés en partenariat avec une entreprise vendéenne qui produit du jus de pomme. Il s'avère que le mélange pomme -pitaya s'est révélé particulièrement intéressant. « C'est un produit agréable, équilibré, avec un certain nombre de vertus et qui peut compléter notre gamme en période de forte production ».
Le début d'une grande histoire ?
Un beau projet donc, à la fois ambitieux et prometteur, mais aussi coopératif : « Lorsque j'ai parlé de ce projet au directeur d'Océane, Christian Bardoul, qui venait de prendre possession de ses fonctions au sein de la société, il m'a tout de suite apporté son soutien et a accueilli avec enthousiasme cette nouvelle idée. Sans Océane et son équipe, la culture n'aurait pu voir le jour. Je suis convaincu par ailleurs que le pitaya a beaucoup d'avenir, qu'une filière française pourrait être créée, que le modèle que nous construisons pourrait être réplicable auprès d'autres producteurs, et même ouvrir la voie à d'autres cultures exotiques . L'essai a été marqué, à nous maintenant de le transformer ! »
Pour plus d'informations :
Abderrahim Oufaquir
SCEA Les Petites Métairies
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