Le Parlement européen veut réglementer pratiquement toute la chaîne d'approvisionnement alimentaire européenne, malgré les avertissements de la BEUC (Association Européenne des Consommateurs ) et des services européens de concurrence face aux conséquences néfastes pour le pouvoir d'achat des consommateurs, qui dépenseront davantage pour le même panier d’achats. Cela dit, la CBL, l'organisation néerlandaise des supermarchés et des entreprises de services alimentaires, est à la veille d'une décision très importante à Bruxelles sur la réglementation de la chaîne d'approvisionnement alimentaire.
Le Parlement Européen (PE) insiste sur le fait que les agriculteurs et les fabricants qui génèrent plus d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires par an devraient être protégés contre les gros acheteurs (producteurs et détaillants) dans le cadre de la nouvelle législation de l'UE sur les pratiques commerciales pour la chaîne d'approvisionnement alimentaire. D'autre part, le gouvernement néerlandais est d'avis que seuls les petits et moyens agriculteurs et les producteurs réalisant un chiffre d'affaires maximal de 50 millions d'euros par an devraient être protégés par la législation. Ceci est conforme à la proposition initiale de la Commission européenne, que la CBL soutient également. Certains pays membres seraient néanmoins disposés à faire des compromis pour parvenir à un accord. Mercredi, le Parlement Européen, la Commission et les pays membres se réunissent pour la cinquième fois à Strasbourg afin de parvenir à un compromis.
Le BEUC, (Association Européenne des Consommateurs ), dont fait partie la ligue néerlandaise, se dit « très inquiète » des efforts du Parlement Européen et craint une augmentation des prix des aliments. L'organisation néerlandaise des consommateurs ne voit aucune justification du fait que le Parlement veuille étendre la portée de la proposition législative initiale de la Commission européenne allant des petits et moyens agriculteurs et producteurs aux grandes coopératives agricoles et aux grands producteurs. Le BEUC affirme qu'au lieu de protéger les PME et les agriculteurs, le Parlement crée une situation dans laquelle les gros producteurs peuvent faire pression sur les propriétaires de toute la chaîne d'approvisionnement pour défendre leurs propres intérêts économiques.
Selon Paolo de Castro, vice-président de la Commission agricole du Parlement Européen et représentant du Parlement dans les négociations de compromis avec les pays membres, le PE veut accorder une protection aux entreprises dont le chiffre d'affaires annuel s'élève à 1,25 milliard d'euros. En conséquence, la quasi-totalité de la chaîne d'approvisionnement alimentaire européenne deviendrait réglementée. Seul un petit pourcentage de producteurs réalise plus de 1,25 milliard euros de chiffre d'affaires, dont Nestlé, Coca-Cola et Unilever.
Les services concurrentiels européens partagent les inquiétudes du BEUC. L'élargissement de la portée de la législation des PME aux grands producteurs « réduit la pression que les grands acheteurs peuvent exercer sur les grands producteurs afin de réduire leurs marges, entraînant une perturbation importante du marché car il y aura un impact sur les prix pour les consommateurs » , selon les services concurrentiels européens.
De plus, les services concurrentiels européens prévoient que, lorsque les grands producteurs peuvent exiger des prix plus élevés, ils ne le partageront pas avec les agriculteurs, les maraîchers ainsi que les fournisseurs des PME, afin de garder tout pour eux-mêmes.
La CBL mentionne que la réglementation excessive de la chaîne d'approvisionnement de la distribution alimentaire affectera les consommateurs ayant moins à dépenser. « Ils dépensent la majeure partie de leurs revenus dans de la nourriture, relativement parlant. En conséquence, ils ressentiront la hausse des prix. C’est le groupe qui s’oppose actuellement aux prix élevés des moyens de subsistance tels que les coûts énergétiques, les loyers, le coût des soins et le prix des denrées alimentaires dans certains pays membres de l’Union européenne, y compris les Pays-Bas. Nibud a récemment conclu que sur huit millions de ménages aux Pays-Bas, 2,6 millions ont des difficultés à joindre les deux bouts », a déclaré Marc Jansen, responsable de la CBL.
La CBL appelle les pays membres de l'UE, et en particulier la vice-première ministre néerlandaise Carola Schouten, à rester vigilants et à limiter la portée de la législation aux PME et aux agriculteurs. « Le concept de PME repose sur des principes bien ancrés des droits de l'UE. Le fait d'étendre la définition actuelle des PME à 1,25 milliard euros de chiffre d'affaires, comme le souhaite le Parlement européen, est complètement arbitraire car cela rendrait la nourriture inutilement coûteuse », dit Jansen de la CBL. « C’est irresponsable d’élaborer un marchandage de cette manière avec une législation européenne sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire, qui affectera chaque jour des millions de transactions dans des milliers de scénarios différents. Bien sûr, sans prendre en compte sérieusement les impacts et les conséquences involontaires. Les consommateurs devront donc payer la facture de l'organisation du Parlement européen. »
Source : CBL